Ce rapport a été produit par OCHA en collaboration avec les partenaires humanitaires et concerne les vagues de déplacements internes depuis le 21 juillet 2015. Il est publié par OCHA Tchad et couvre la période du 1er au 31 octobre 2016. Le prochain rapport sera publié vers le 6 décembre 2016.
Faits saillants
La situation sécuritaire est calme, mais marquée par quelques incidents sécuritaires dans les zones frontalières.
Le nombre de personnes en situation de reddition est en augmentation, plus de 1 000 personnes seraient arrivées.
Les dynamiques de déplacements secondaires continuent. A ce jour, il y a 117 873 déplacés dans la région du Lac, et 6 994 réfugiés. Les déplacements affectent également la région du Kanem.
Les résultats de l’enquête SMART 2016 rapportent 12,2% de malnutrition aigüe globale et 2,1% de malnutrition aigüe sévère dans la région du Lac. La malnutrition chronique est de 36%, le taux régional le plus élevé du pays.
On observe une amélioration de l’accès à l’eau et à l’assainissement : le taux d’accès à l’eau est passé de 23 à 41% dans les sites et villages d’accueil entre août et septembre, et le taux d’accès à l’assainissement de 10 à 20%.
La grève des enseignants du fait du non-paiement des salaires et de la suppression des primes paralyse la rentrée scolaire, qui a seulement été effective dans trois écoles privées et au camp de réfugiés de Dar-es-Salam.
Seuls 43% des financements requis pour la réponse humanitaire dans la région du Lac en 2016 ont été reçus à fin octobre.
95 063 déplacés enregistrés depuis mai 2015 Dont :
- 82 260 déplacés internes - 12 481 retournés Tchadiens - 322 ressortissants des pays tiers
22 810 déplacés estimés pas encore enregistrés.
6 994 réfugiés dont 5 424 dans le camp de Dar-es-Salam depuis janvier 2015.
Aperçu de la situation
La situation reste marquée par des incidents sécuritaires dans les zones frontalières de la région du Lac, notamment un vol de bétail dans la sous-préfecture de Kaiga-Kinjiria le 15 octobre et une attaque le 23 octobre à Kolerom, à 12km au nord-ouest de Tchoukoutalia, qui aurait entrainé le décès de deux civils et une intervention militaire.
Plus de 1 000 personnes se trouvent actuellement en situation de reddition dans la région du Lac (statut à déterminer par les autorités compétentes), y compris au moins 235 enfants. Ces personnes sont détenues par les autorités administratives et militaires à Baga-Sola. Une mission conjointe du « Mécanisme de surveillance et de communication de l’information » sur la résolution 1612 du Conseil de sécurité des Nations Unies (MRM - Monitoring Reporting Mechanism) composée du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), du Haut-Commissariat pour les Réfugiés (UNHCR), d’OCHA, des ministères de l’Action Sociale, de la Justice, des Affaires étrangères et de la Défense Nationale, a eu lieu du 24 au 26 octobre à Bol et Baga-Sola pour assurer le plaidoyer auprès des autorités civiles et militaire pour le respect du Protocole d’accord entre le Tchad et les Nations Unies relatif au transfert des enfants associés aux forces et groupes armés signé en 2014. Un Centre de Transit et d’Orientation (CTO) est en place à Bol depuis juin 2016 pour l’appui aux enfants séparés et non-accompagnés.
Des incendies ont affecté deux villages dans la sous-préfecture de Ngouboua. Les 17 et 18 octobre, des incendies dont l’origine reste inconnue ont eu lieu à Kaiga-Ngouboua et Ngoubouacentre. L’ONG Help-Tchad aurait identifié 170 ménages affectés à Ngouboua-Centre parmi lesquels quatre ménages réfugiés selon la Commission Nationale d’Accueil et de Réinsertion des Réfugiés et Rapatriés (CNARR). Selon le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) et la Croix-Rouge Tchadienne (CRT), il y aurait 219 ménages affectés à Kaiga-Ngouboua, dont 33 ménages réfugiés et 11 ménages de déplacés. Par ailleurs, environ 17 000 sacs de céréales (dont 10 000 à KaigaNgouboua et 7 000 à Ngouboua) et d’autres biens auraient été détruits. Les besoins urgents concernent les abris et articles ménagers essentiels, ainsi que l’assistance alimentaire, médicale et psychosociale. Plusieurs partenaires se sont déjà positionnés pour fournir une réponse d’urgence. A Kaiga-Ngouboua, les difficultés d’accès à la zone, notamment liées au contexte sécuritaire fragile et à la montée des eaux, constituent un obstacle important à la réponse sur cette localité.
Les mouvements de population s’étendent au-delà de la région du Lac. Suite à une alerte des autorités locales, une mission conjointe composée du Programme Alimentaire Mondial (PAM), de l’UNICEF, d’OCHA, des ONG Action Contre la Faim (ACF), SECADEV, ARNUT, et des services étatiques s’est rendue du 25 au 26 octobre à Foyo, village situé à 60 km au nord- est de Rig Rig, dans la région du Kanem. La mission confirme l’arrivée depuis septembre de 70 ménages d’éleveurs nomades soit environ 222 personnes (chiffre à confirmer car les populations locales se seraient intégrées aux déplacés) comprenant en majorité des femmes et des enfants (69% de femmes et d’enfants), en provenance de localités situées entre le Lac Tchad et le Niger. Leur déplacement ferait suite à des attaques par des groupes armés. Les populations sont prises en charge et soutenues par les populations hôtes, mais font face à des conditions de vie précaires et ont des besoins urgents en assistance alimentaire, abris et en prise en charge de la malnutrition (renforcement des capacités au centre de santé de Foyo).
La coordination civilo-militaire se met en place à Baga-Sola. En effet, le contexte dans la région du Lac rend nécessaire le maintien d’une distinction claire entre humanitaires et militaires, afin de protéger l’accès et les principes humanitaires, et garantir la sécurité des travailleurs humanitaires. La coordination civilo-militaire vise à créer un espace officiel et régulier de dialogue entre les forces présentes dans la région (Armée Nationale Tchadienne, Force Multinationale Mixte, forces de sécurité nationales) et les partenaires humanitaires, dans le but de maintenir la liaison avec les militaires, promouvoir les principes humanitaires et discuter des questions d’accès et de la protection des civils.
L’assistance humanitaire augmente grâce à l’arrivée de nouveaux partenaires pour répondre aux besoins des populations dans la région du Lac. Les ONG Islamic Relief Worldwide et World Vision envisagent des interventions multisectorielles (sécurité alimentaire, eau hygiène et assainissement, protection, articles ménagers essentiels), tandis que l’ONG INTERSOS se positionne pour une intervention en santé/nutrition dans une trentaine de sites sur l’axe Liwa-Daboua, et l’ONG LWF (Lutheran World Federation) vise à mettre en œuvre des projets en moyens d’existence / environnement / énergie. L’Association des Femmes Juristes du Tchad (ASFJT) vient de s’installer à Baga Sola et Bol afin d’apporter une réponse aux Violences Basées sur le Genre (VBG).
L’association, financée par UNFPA, s’occupera de sensibilisations, formations, et de la prise en charge psychosociale et juridique des survivants/tes.