12/15/2013 18:31 GMT
Par Sébastien RIEUSSEC et Serge DANIEL
BAMAKO, 15 décembre 2013 (AFP) - Les Maliens ont voté sans enthousiasme dimanche au second tour de législatives devant parachever le retour à l'ordre constitutionnel après le coup d'Etat de 2012, au lendemain d'un attentat jihadiste qui a tué deux soldats sénégalais de l'ONU.
De l'ouverture des bureaux à 08H00 (locales et GMT) jusqu'à leur fermeture à 18H00, des journalistes de l'AFP ont pu constater une faible affluence à Bamako, confirmée par les observateurs maliens.
Le Pôle d'observation citoyenne électorale (Poce) qui a déployé 3.300 observateurs indépendants dans le pays a noté dans l'après-midi que "l'affluence est faible dans la plupart des centres de vote, à l'exception de ceux des circonscriptions de Gao et Ansongo (nord) où elle est relativement plus importante qu'au premier tour" du 24 novembre.
"Les gens ne sont pas motivés", selon Badra Traoré, président d'un de ces bureaux, en raison "du comportement des dirigeants, des autorités de ce pays".
Au premier tour, le taux de participation avait été nettement plus faible qu'à la présidentielle de l'été - 38,6% contre 48,9% - et il risquait de l'être plus encore dimanche, selon les observateurs.
En dépit de ce risque, le président Ibrahim Boubacar Keïta a déclaré en allant voter à Bamako que ce second tour allait redonner "un socle de grande légitimité"à son pays. "Ca nous donnera plus de force, de puissance pour dire le Mali et le Mali en a besoin", a-t-il ajouté.
Quelque 6,5 millions de Maliens étaient appelés à participer à cette dernière étape d'un processus électoral qui, après la présidentielle remportée le 11 août par Ibrahim Boubacar Keïta, doit sceller le retour à l'ordre constitutionnel interrompu le 22 mars 2012 par un coup d'Etat ayant précipité la chute du nord du pays aux mains de groupes jihadistes.
Ces groupes liés à Al-Qaïda ont été affaiblis par une intervention militaire internationale lancée par la France en janvier et toujours en cours, mais ils restent actifs, comme l'illustre l'attentat à la voiture piégée commis samedi à Kidal (nord-est), revendiqué par les jihadistes.
Un véhicule bourré d'explosifs a foncé sur la Banque malienne de solidarité (BMS) gardée par des soldats maliens et d'autres Africains, appartenant à la force de l'ONU au Mali, la Minusma. Deux soldats sénégalais ont été tués, et au moins sept Casques bleus et plusieurs soldats maliens ont été blessés, certains grièvement.
Forces armées en état d'alerte
Dans le Nord, à Gao et Tombouctou, le vote s'est déroulé dans la crainte d'un nouvel attentat, selon des électeurs interrogés par l'AFP. Ceux de la région de Kidal n'avaient pas à se déplacer, leurs quatre députés ayant été élus au premier tour.
Oumar Diré, un habitant de Tombouctou, a déclaré qu'il ne votait pas par "peur des attentats que les islamistes menacent de commettre".
La même hantise était partagée par Germain Togo, électeur à Gao, la plus grande ville du nord du Mali: "Voter, c'est quelque chose d'important, mais on fait attention, parce qu'on a peur des attentats".
Les forces de l'ONU, de la France et du Mali, qui ont assuré la sécurité du scrutin, ont été en état d'alerte maximum toute la journée pour prévenir de tels attentats, en particulier dans le Nord.
Le président sénégalais Macky Sall a assuré que l'attentat de Kidal "n'entamera en rien l'engagement résolu du Sénégal au Mali".
L'attentat s'est produit alors que l'armée française a mené ces derniers jours une grande opération anti-jihadistes au nord de Tombouctou.
Dix-neuf jihadistes ont été tués lors de cette opération, a confirmé dimanche Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères. "Il y a au Nord encore un certain nombre de difficultés mais dans l'ensemble, le Mali est sécurisé", a-t-il ajouté.
A l'issue du premier tour du 24 novembre, seuls 19 sièges avaient été pourvus sur les 147 que compte l'Assemblée nationale.
L'objectif pour le président Keïta est que son parti, le Rassemblement pour le Mali (RPM), et ses alliés obtiennent une confortable majorité à l'Assemblée nationale.
Soumaïla Cissé, candidat malheureux au second tour de la présidentielle, avait été élu dès le premier tour dans sa circonscription de Niafunké, près de Tombouctou. Avec son parti, l'Union pour la République et la démocratie (URD), il ambitionne de devenir le chef de l'opposition parlementaire.
Les résultats provisoires de ce second tour doivent être publiés d'ici vendredi par le ministère de l'Administation territoriale avant d'être confirmés par la Cour constitutionnelle.
Plusieurs centaines d'observateurs nationaux et internationaux ont surveillé le scrutin, essentiellement dans le sud et le centre du pays, le Nord étant considéré comme encore trop dangereux pour s'y aventurer.
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