CS/11210 Conseil de sécurité 7081e séance – matin
Le Conseil de sécurité a, ce matin, réaffirmé sa volonté de trouver une solution aux problèmes d’ordre sécuritaire, politique, humanitaire, écologique et de développement de la région du Sahel, où continue de régner une « situation alarmante ».
Dans une déclaration présidentielle lue par son Président pour le mois de décembre, l’Ambassadeur Gérard Araud, de la France, le Conseil prie, à cet effet, le Secrétaire général d’œuvrer rapidement à la mise en œuvre effective de la Stratégie intégrée de l’ONU pour le Sahel.
M. Romano Prodi, qui s’exprimait pour la dernière fois en tant qu’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sahel, a insisté sur les progrès enregistrés dans la mise en œuvre de cette Stratégie, depuis sa présentation au Conseil en juin dernier. Il a en particulier invité la communauté internationale à maintenir son attention sur la région du Sahel car, a-t-il prévenu, cette attention est en déclin. Il a émis la crainte que la mise en œuvre de la Stratégie intégrée risque de souffrir du fait que la crise dans la région soit en concurrence avec d’autres crises ailleurs dans le monde.
Le Conseil de sécurité, dans sa déclaration présidentielle juge important de susciter l’appropriation nationale et régionale de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et d’en assurer la mise en œuvre en étroite consultation avec les États du Sahel, de l’Afrique de l’Ouest et du Maghreb, et avec les donateurs et partenaires régionaux et multilatéraux. Les entités des Nations Unies qui concourent à la mise en œuvre de la Stratégie sont, pour leur part, priées de coordonner leurs actions de manière à optimiser les synergies.
Pour rappel, cette Stratégie intégrée, demandée par le Conseil dans sa résolution 2056 (2012), est basée sur la bonne gouvernance dans l’ensemble de la région, des mécanismes de sécurité nationaux et régionaux capables de faire face aux menaces transfrontières, et l’intégration des plans humanitaires et de développement afin d’assurer la résilience à long terme.
Ouvrant la réunion, le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, est revenu sur la visite qu’il a effectuée du 4 au 7 novembre au Mali, au Niger, au Tchad et au Burkina Faso, aux côtés du Président de la Banque mondiale, M. Jim Yong Kim, et de hauts responsables de l’Union africaine et de l’Union européenne. Le Président de la Banque mondiale s’est exprimé, aujourd’hui devant le Conseil, par vidéoconférence depuis Washington D.C.
Le Secrétaire général a rappelé, qu’à Bamako, première étape de sa visite, les responsables des organisations internationales et les dirigeants africains ont promis d’améliorer leur coopération dans le cadre de la Stratégie intégrée. « L’immensité de la région et la porosité des frontières signifient que ces défis ne pourront être relevés que si les pays de la région travaillent ensemble », a affirmé M. Ban.
L’Observateur permanent de l’Union africaine auprès des Nations Unies, M. Téte António, a d’ailleurs profité de ce débat pour faire part de la disponibilité de son organisation de travailler à la mise en place du secrétariat conjoint sur la Stratégie intégrée de l’ONU pour le Sahel. Qualifiant la visite du mois dernier « d’historique », le Président de la Banque mondiale a, pour sa part, confirmé l’allocation d’une première enveloppe de 1,2 milliard de dollars aux efforts de développement de la région. « Cette aide servira de premier filet de sécurité pour venir en aide aux ménages », a-t-il précisé. Pour sa part, le Représentant spécial de l’Union européenne pour le Sahel, M. Michel Reveyrand-de Menthon, a indiqué que l’Union européenne consacrerait 5 milliards d’euros au Sahel au cours des sept prochaines années.
Détaillant les progrès enregistrés dans la mise en œuvre des trois piliers de la Stratégie, M. Prodi a précisé qu’il avait axé les efforts sur le renforcement des capacités en vue d’assurer plus efficacement les services de base et l’appui aux processus électoraux. Au titre du renforcement des mécanismes sécuritaires, l’Envoyé spécial a assuré que la mise en œuvre des activités pour une gestion intégrée des frontières et la prévention de l’idéologie violente avaient démarré. La plateforme de coordination, adoptée à Bamako dans le cadre de la Stratégie intégrée, devrait être élargie aux pays voisins, notamment le Maroc, l’Algérie, le Sénégal et surtout la Libye, a-t-il préconisé. « La situation en Libye a un impact sur toute la région », a-t-il expliqué. Enfin, en ce qui concerne le troisième pilier, M. Prodi a indiqué que des interventions avaient été définies pour améliorer la résilience dans sept pays de la région sahélienne. « Des lacunes ont été identifiées dans les domaines de la microassurance et de l’autonomisation des communautés pastorales », a-t-il conclu.
Lors des échanges qui ont suivi, les membres du Conseil de sécurité ont salué, de manière unanime, la récente visite conjointe dans la région, « signe que le Sahel fait partie des priorités de la communauté internationale », comme l’a affirmé le représentant de la Chine. Si elles ont reconnu la pertinence de la Stratégie intégrée des Nations Unies, certaines délégations, à l’instar de celle du Maroc –pays qui a initié la déclaration présidentielle– en ont demandé une mise en œuvre rigoureuse. « Les 150 millions d’habitants de la région du Sahel ne pourront pas résister longtemps à la tentation d’immigrer si les conditions économiques et sociales ne s’améliorent pas », a prévenu le délégué du Maroc.
Le représentant de la France a, pour sa part, insisté sur la notion de confiance, élément clef pour la réussite de la Stratégie intégrée. « Sans confiance entre tous les États de la région, nous ne pourrons pas apporter une réponse coordonnée aux défis transnationaux », a-t-il lancé. Son homologue de la Fédération de Russie a déclaré que la mise en œuvre de la Stratégie intégrée sera évaluée à l’aune des résultats obtenus.
Comme le souligne la déclaration présidentielle, le Secrétaire général devra présenter au Conseil de sécurité le rapport sur l’état d’avancement de la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel le 30 juin 2014 au plus tard. La situation au Mali a été abordée par un grand nombre d’intervenants, dont la déléguée du Luxembourg, qui a fait observer que la crise malienne était la « manifestation la plus aiguë et la plus récente d’un cycle récurrent d’insécurité dans la région du Sahel ». Tandis que l’Envoyé spécial a salué les progrès accomplis depuis l’opération française dans ce pays, le Secrétaire général a déploré que le processus politique entre le Gouvernement malien et les groupes armés ait été retardé. « Nous devons continuer de renforcer la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA)», a-t-il préconisé.