01/23/2013 17:41 GMT
Par Serge DANIEL
BAMAKO, 23 jan 2013 (AFP) - Les accusations d'exactions contre des soldats de l'armée malienne dans l'ouest et le centre du Mali se multiplient, conduisant Paris a appelé à la "vigilance" au treizième jour de l'intervention militaire française contre les groupes islamistes armés qui contrôlent le Nord du pays.
La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a plaidé mercredi pour renforcer le soutien de Washington à la lutte contre les groupes islamistes armés au Mali, comparant la menace d'Al-Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi) à celle de Ben Laden et du 11-Septembre.
"Les gens me disent tout le temps, Aqmi n'a pas attaqué les Etats-Unis. Oui mais avant le 11 septembre 2001, nous n'avions pas été attaqués sur notre territoire depuis, je crois la guerre de 1812 et Pearl Harbor", a-t-elle expliqué lors d'une audition très médiatisée au Sénat, à Washington.
Treize jours après le début de l'intervention française qui a donné un coup d'arrêt à la progression des islamistes vers le Sud, la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) a accusé mercredi des soldats de l'armée malienne d'avoir perpétré "une série d'exécutions sommaires", dans l'ouest et le centre du Mali et réclamé la création "immédiate" d'une commission d'enquête indépendante.
Au moins 11 personnes ont été exécutées à Sévaré (650 km au nord-est de Bamako), dans le camp militaire de l'armée malienne, à proximité de la gare routière et près de l'hôpital, a détaillé l'ONG qui enquêtait depuis plusieurs jours sur ces cas qu'elle n'avait jusque-là pas pu confirmer.
"Nous avons obtenu des témoignages concordants de sources locales et nous avons les identités des onze victimes", a affirmé Florent Geel, responsable Afrique de la FIDH, actuellement au Mal.
Ces exactions visent tout particulièrement les communautés arabe et touareg, très largement majoritaires au sein des groupes islamistes armés.
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a appelé mercredi l'encadrement de l'armée malienne, en guerre au côté de la France contre des islamistes au Mali, à être "extrêmement vigilant" envers les risques d'exactions car leur "honneur est en cause".
Son collègue des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a estimé de son côté qu'il n'était pas possible d'"accepter des violations des droits humains".
"Les Touareg, nos amis"
Lors d'une audition à l'Assemblée nationale, M. Fabius a ajouté qu'il avait évoqué ces questions avec le Premier ministre malien Diango Cissoko, mercredi au téléphone, et que le président malien Dioncounda Traore allait à nouveau adresser une mise en garde aux troupes maliennes en fin de semaine.
Les Touareg "sont nos amis", "sauf ceux qui se sont laissés embrigader par des groupes terroristes que nous condamnons totalement", a ajouté le ministre.
Le chef d'état-major de l'armée malienne a promis mardi que "tout soldat qui commettra des exactions contre des population civiles sera immédiatement ramené du terrain et jugé par un tribunal militaire", mettent en particulier en garde contre des atteintes visant les "peaux blanches", Arabes et Touareg au Mali.
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, qui avait salué l'intervention "courageuse" de la France au Mali, avait aussi fait part mardi de ses craintes concernant l'impact de l'opération sur les civils et les droits de l'homme.
A Paris, le chef de la diplomatie française a aussi affirmé que tous les soutiens internationaux supplémentaires à la guerre au Mali seraient "les très bienvenus".
Certaines interrogations ont commencé à poindre sur un isolement de la France: si elle a engrangé le soutien quasi unanime de la communauté internationale et des appuis en matière de logistique, mais aucun pays occidental ne s'est engagé à participer à la guerre sur le terrain.
Plus de 2.300 soldats français sont déjà déployés au Mali, nombre qui va rapidement augmenter, d'autant que Paris bénéficie depuis lundi de l'aide des Etats-Unis qui transportent troupes et équipements français, depuis la France vers l'Afrique de l'ouest.
Cette intervention a coûté en douze jours environ "30 millions d'euros", a déclaré mercredi Jean-Yves Le Drian.
Le président de l'Union africaine et dirigeant du Bénin, Thomas Boni Yayi, a plaidé une nouvelle fois mercredi à Berlin pour une implication de tous les membres de l'Otan dans l'intervention militaire au Mali, tout en saluant le rôle de la France.
Mais la chancelière Angela Merkel a exclu de nouveau l'envoi de soldats allemands au Mali.
Parallèlement, les contingents des pays africains, qui doivent aider l'armée malienne à reconquérir le nord du pays, regroupent désormais près de 1.600 hommes au Mali et au Niger, selon Paris.
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