La bande sahélienne d’Afrique de l’ouest dont fait partie le Niger se trouve confrontée à des crises alimentaires de plus en plus fréquentes et de magnitude croissante. A cela s’ajoutent les suites des conflits armés en Libye et en Côte d’Ivoire en 2011, qui ont forcé au retour plus de 260 000 migrants. En l’absence de nouvelles opportunités économiques, la couverture des besoins vitaux de ces migrants et de leurs familles reste un défi. Les conflits au nord du Mali et du Nigéria ont engendré l’arrivée au Niger de 50 000 réfugiés maliens et de milliers de retournés nigériens, ainsi que des expulsés du Nigeria. Ces mouvements de populations devraient continuer dans les mois à venir (55 000 pour le Mali selon le plan de contingence).
La gravité des problèmes humanitaires du Niger vient du fait que non seulement le Niger est à l’épicentre des crises alimentaires au Sahel, mais en plus il subit directement les conséquences de conflits et de l’insécurité qui assaillent les sous-régions du Sahel et du Magheb.
En 2011, le Niger a connu un déficit agricole et pastoral important, à fort potentiel de crise alimentaire et nutritionnelle. Grâce à la bonne préparation des acteurs, l’essentiel des besoins a pu être couvert à temps, évitant ainsi une crise aux conséquences dramatiques pour les populations et le cheptel. Les bonnes récoltes en 2012 ne doivent néanmoins pas occulter l’étendue et la gravité de l’insécurité alimentaire et de la situation nutritionnelle. La dernière enquête SMART de juillet 2012 a révélé un taux de MAG de 14.8% et de MAS de 3%. Le taux de MAG dépasse largement le seuil d’alerte de 10% et proche du seuil d’urgence de 15%2.
La lutte doit non seulement se poursuivre, mais s’intensifier pour adresser les causes profondes de la malnutrition. Au Sahel, en général, et en particulier au Niger, le couple insécurité alimentaire et malnutrition constituent le principal défi humanitaire.
La situation d’insécurité alimentaire chronique qui affecte le pays a profondément entamé les moyens d’existence des populations nigériennes à 80% composées d’agriculteurs et d’éleveurs. Chaque année, entre 15 à 20% de la population (2 à 3 millions de personnes) se trouve en insécurité alimentaire - même en année de production excédentaire. Selon les résultats de l’enquête de vulnérabilité publiés lors de la réunion nationale de synthèse d’évaluation de la situation alimentaire, nutritionnelle et pastorale de l’année 2012 qui s’est tenue à Maradi du 23 au 24 novembre 2012, Cent quatre-vingt-cinq zones regroupant 3243 villages pour une population estimée à 2 483 051 habitants serontvulnérables à l’insécurité alimentaire en 2013.
En plus des problèmes alimentaires, nutritionnels et des conflits armés dans la sous-région, le Niger a également été victime en 2012 des inondations sans précédent, qui ont touché plus d’un demi-million de personnes. Ces inondations ont abîmé sérieusement les habitations, les infrastructures publiques, les cultures vivrières fluviales et de rente. Une centaine de personnes sont décédées de leurs suites. L’imprédictibilité des précipitations, la dégradation continue de l’environnement, la précarisation des conditions de vie combinées auxeffets du changement climatique laissent présager des inondations de grandes ampleurs dans les années à venir.
Les efforts de prévention des épidémies évitables comme la rougeole et la poliomyélite se poursuivront avec un succès limité. Le choléra et le paludisme gagneront en prévalence d’année en année du fait de mauvaises conditions d’hygiène, du manque d’accès à l’eau potable, des inondations, de la grande promiscuité (surtout dans les camps) et de l’insuffisance des mesures de prévention.
La menace acridienne et autres ennemies des cultures, ainsi que les feux de brousse, sont réguliers au Niger. Leur gravité varie suivant le niveau de prévention et de préparation pour y faire face.
Ces fléaux peuvent affecter les mêmes familles plusieurs fois au cours de la même année, plusieurs années de suite. Leurs moyens de subsistance s’effritent continuellement, puis disparaissent. Leur résilience amenuisée ou perdue, ces ménages ou communautés nécessitent la mise en place de programmes pluriannuels de relèvement pour retrouver à nouveau le chemin d’un développement durable.
Selon les analyses faites par les différents clusters et les scénarii du plan de contingence national multirisque, la situation humanitaire en 2013 sera caractérisée par l’interaction entre les séquelles des crises alimentaires, pastorales et nutritionnelles combinées aux conséquences des conflits armés et de l’insécurité dans les pays voisins du Niger: Mali, Nigéria et Libye. Cette situation pourraient s’exacerber du fait de:
- La persistance, voire l’extension, du choléra à d’autres foyers vulnérables, et une épidémie de paludisme lorsque les pluies abondent.
- L’invasion acridienne et les maladies détruisant les cultures.
- La flambée des prix des produits de première nécessité.
- Les inondations, feux de brousse, les épizooties...
La réponse humanitaire en 2013 concernera toutes les régions du pays avec un focus particulier sur: - Les régions de Tillabéri et de Tahoua en raison de poches d’insécurité alimentaire prévues en 2013 du fait de la faiblesse de production céréalière et pastorale (évaluation à mi-parcours de la campagne), de la forte prévalence de la malnutrition, et du nombre de réfugiés en provenance du Mali.
- Un accent spécifique devrait être porté sur les ménages ruraux dirigés par des femmes, qui sont deux fois plus affectés par l’insécurité alimentaire que ceux dirigés par les hommes (25.8% contre 12.6%).
- Des initiatives et des programmes visant à promouvoir le relèvement des populations après les crises et accroître leur capacité d’adaptation aux nouvelles crises et catastrophes. Les populations déjà victimes des crises précédentes devront être prioritairement ciblées: les victimes de l’insécurité alimentaires des crises de 2009/2010 et celles de 2011/2012; les victimes des inondations de 2012 de Tillabéry, Niamey, Dosso et Diffa.
- L’établissement d’un lien de complémentarité entre différents projets et une meilleure articulation avec les activités à plus long terme, afin d’apporter une réponse holistique aux besoins prioritaires des communautés.
- L’intégration des thématiques transversales telles que le genre, le VIH/Sida, la protection de l’environnement.